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La Servitude électrique - Du rêve de liberté à la prison numérique
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Caractéristiques | |
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Auteurs | Gérard Dubey & Alain Gras |
Éditeur | Seuil |
Collection | Anthropocène |
Date de parution | 14/01/2021 |
Langue | FR |
Nombre de pages | 384 |
Format | 14 x 19 cm |
EAN | 978-2021432800 |
ISBN | 2021432807 |
Page Web (éditeur) | La Servitude électrique |
Présentation par l'éditeur
L'action de l’électricité se révèle dans trois domaines principaux : la lumière, la force, l’information. Une telle immatérialité la fait passer pour innocente. Pourtant, son efficacité repose essentiellement sur le pouvoir du feu, elle n’est qu’un vecteur énergétique. Dégâts et déchets sont cachés en amont ou en aval de son utilisation.
À travers un parcours historique d’Ampère à Bill Gates, les auteurs démontent les coulisses et les travers du mythe électrique et de la numérisation de nos existences. Non, le tout-électrique-tout-numérique ne sauvera pas la planète ! Avant qu’ils ne nous emprisonnent totalement, arrachons-nous à leur pouvoir de séduction et sortons de la Matrix.
Les auteurs
Gérard Dubey est sociologue, professeur à l’Institut Mines-Telecom Business School. Il est l’auteur de « Le Lien social à l’ère du virtuel » (PUF, 2001), « Dans la peau d’un pilote de chasse » (PUF, 2016, avec C. Moricot) et « Mauvais temps » (Dehors, 2018, avec P. de Jouvancourt).
Alain Gras est professeur émérite de socio-anthropologie des techniques à l’université Paris 1-Sorbonne. Il a publié « Les Macro-systèmes techniques » (PUF, 1997), « Fragilité de la puissance » (Fayard, 2003), « Le Choix du feu » (Fayard, 2007) et Oil (B2, 2015).
Tous deux sont chercheurs au Centre d’études des techniques, des connaissances et des pratiques (UFR de Philosophie) fondé par Alain Gras.
Table des matières
Introduction
Première partie : L’électricité dans tous ses états
1. Le phénomène électrique, origines et signification cachées
2. Les débuts de la vie électrique : maudite soit l’obscurité
3. Une fantasmagorie industrielle
4. L’énergie introuvable
5. Le rapport au thermique et la déficience originelle de l’électrique, gage paradoxal de son succès
6. Le macro-système technique. L’électron et la force électrique en conduite forcée dans le réseau, énergie et politique
7. L’ion en cage, la batterie immuable
8. Transmutation naturelle mais ambiguë : l’énergie-eau du barrage
9. Le roi charbon de nouveau couronné par l’électricité
10. Le modèle énergétique des pays émergents : l’électricité draine le charbon
11. Faire la paix avec la Terre : la tentative renouvelable, une espérance ambiguë
12. Éolien et solaire : fréquenter l’énergie
13. Le cas de la mobilité électrique, une vieille histoire, rêve ou mirage
Seconde partie : De la cage électrique à l’enclos numérique
14. Transition numérique : pour continuer comme avant
15. L’enclos numérique ou la malédiction de l’encapsulage
16. Les embarras d’une intelligence hors-sol
17. À la vitesse de la lumière, la fée dévore la Terre
18. Body containment ou la dynamique du monde sans contact
19. Déliaisons numériques et chaos social
20. Éloge du désordre. Pour en finir avec le confinement
Épilogue. Basse tension
Notes
Notes de lecture
La transition dont l’électricité verte serait le vecteur principal n’aura pas lieu. La course à la puissance se réalise, en effet, sans résistance apparente et du fait que la démesure est sa morale. Le chemin énergétique qu’elle nous force à prendre ne mène nulle part ailleurs que dans le monde que nous connaissons, la boucle se referme sur elle-même. La furieuse centralisation et l’obsession de la grandeur qui l’accompagne se traduisent aussi bien dans la volonté d’augmenter la capacité des réacteurs nucléaires que dans l’accroissement de la taille de l’éolienne et de la longueur des pales. De toute manière les effets de l’un et de l’autre se combinent dans le macro-système qui distribue son confort au consommateur ébloui. Se dessine ainsi un avenir préparé dans des officines où le mot « liberté » n’a pas cours car règne la sainte innovation, telle la 5G contre laquelle il est interdit de protester au nom d’un vain progrès que personne n’ose plu définir. La croissance n’est plus que le spectre famélique d’une belle idée, le progrès, imaginée par la raison humaniste au début de cette histoire de l’Anthropocène. Et derrière les besoins satisfaits, se cache maintenant de ma,ière insidieuse de moyens de contrôle social. […]
Ainsi l’espérance ne peut naître que d’un changement radical dans notre mode de vie ou, pour être plus clair, dans nos attentes de consommation et de confort. Le mot de décroissance décoché comme une flèche effraie mais le processus peut être doux, une non-croissance, un état stable. Il convient parfaitement pour rendre intellectuellement raisonnable un avenir énergétique qui serait aussi un projet de réconciliation avec le monde qui nous entoure. L’espoir subsiste ainsi sur un autre terrain, celui de l’imaginaire des êtres qui peuplent ce monde. Supposons un instant que la technoscience puisse faire autre chose que d’alimenter les spéculations boursières aussi bien que les chimères robotiques des états-majors et que la juste mesure, le « rien de trop » antique, redevienne une de ses valeurs. Épilogue – Pages 333 & 334
[Pour le dire autrement,] faire presque entièrement reposer les relations sociales sur les technosciences s’avère, en définitive, être un risque peut-être plus grand que le choix fait par les sociétés qui nous ont précédés de s’en remettre au mythe ou au rite. Pour provocant que soit ce propos, il n’est destiné qu’à alerter sur les dangers qu’il y aurait à s’entêter dans cette voie en hypothéquant entièrement notre avenir sur un supposé devenir numérique de l’humanité.
[Second constat,] le monde électronumérique ne cesse de progresser sur l’oubli de son origine terrestre. L’excroissance incontrôlée des systèmes technologiques est l’ultime rempart des sociétés contemporaines contre la mort et l’arbitraire de la violence, le lieu où elles ont remisé tous leurs espoirs : le système ou la mort. Mais tout indique que, à nous obstiner dans cette direction, nous aurons aussi bien l’un et l’autre : le système et la mort. Une théorie absurde, celle qui consiste à imaginer une connaissance désincarnée qui oppose l’être humain à son milieu, peut bien présider au destin d’une société et de toute une civilisation, elle n’en est pas moins absurde. L’artificialisation du monde, avec l’hypercomplexité qui en découle, ne fait que dévoiler chaque jour un peu plus le caractère insoluble car factice du problème à résoudre : l’idée étrange d’un être vivant séparé du monde.
Tout ne se déroule cependant pas comme prévu. Le fait que l’électricité ne soit pas stockable – sinon aux prix de complications infinies – sape un des principaux piliers du régime capitaliste : l’accumulation, responsable de la transformation de la planète en une vaste déchetterie. […]
L’idée chemine que la technologie n’est peut-être pas le fin mot de l’histoire et que le chaos, « l’anarchie » au sens propre ne sont pas seulement synonymes de déliaison et de fragmentation sociale, mais de vitalité. Ils portent la marque de l’énergie propre du social, auprès de laquelle l’électricité fait pâle figure. Au détour de cette autre expérience du monde remontent à la surface certaines significations de l’antique figure du chaos. Le message politique issu de ces mouvements souterrains de la pensée pourait être le suivant : que les sociétés assument leur part de désordre comme cette part d’elles-mêmes qui constitue leur énergie première.
[…] Ce n’est pas la moindre des surprises que de constater que le moment où la vision technocentrée semble l’avoir définitivement emporté est aussi le moment où la vision d’un monde-objet, réduit à l’état de « décor inerte », cesse de nous parler. Les mouvements sociaux contemporains sont quelques-unes des expressions de cette autre manière de se connecter en démasquant la fausse sécurité de l’enclos numérique. Il en existe bien d’autres, encore invisible, à découvrir. Épilogue – Pages 337 à 339
Suite à rédiger…
Articles divers, podcast & vidéos qui parlent du livre
- L’histoire de l’électricité n’est pas qu’un conte de fée – Nicolas Celnik – Libération – 14/02/2020
- Électrique, numérique : des addictions toxiques ? – C’est pas du vent – Par Anne-Cécile Bras – RFI – 25/02/2021
- Écouter le podcast – (48 min 30)
- La Servitude électrique, Gérard Dubey, Alain Gras, 2021, Seuil – Institut Mines-Télécom – 04/03/2021
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